Les territoires français du Pacifique, à savoir la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna, ont fait de sérieux progrès en matière de gestion des huiles usagées nocives pour la santé humaine et l'environnement.
Les progrès réalisés par les territoires français en matière de gestion des huiles usagées, et la manière dont ils ont transformé un problème en solution ont été présentés lors d'une session thématique qui s'est tenue le premier jour de la 3ème table ronde pour un Pacifique propre organisée du 16 au 25 novembre 2021. L'événement a permis de donner un aperçu des défis relatifs à la gestion des huiles usagées dans le Pacifique. Les territoires français ont ainsi partagé leurs expériences au regard des outils législatifs, techniques et financiers existants pour faire face à cette question.
Cette session thématique a été organisée en français dans le but de valoriser la diversité des enseignements pouvant être partagés par l’ensemble des îles du Pacifique. Elle était animée par Mme Julie PILLET, coordinatrice technique du projet SWAP financé par l'AFD.
"De manière générale, ces huiles usagées comprennent les huiles moteur, les huiles de compresseur, les fluides hydrauliques, etc. et, en raison de nos modes de production et de notre mode de vie, nous ne pouvons pas nous en passer", a rappelé Mme PILLET.
Or, ces huiles usagées peuvent contenir des composés nocifs pour la santé humaine et l'environnement, notamment des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), des particules de métaux lourds et d'autres additifs tels que les polychlorobiphényles (PCB), ou des produits chimiques utilisés pour améliorer leurs performances.
De ce fait, l'absence de dispositifs appropriés de collecte, de stockage, d'élimination et de traitement des huiles usagées peut entraîner une contamination de l'environnement en cas de déversement (pollution des sols, des nappes phréatiques, des cours d'eau ou des océans), ou avoir un impact sur la santé humaine (les composés dangereux peuvent induire divers types de cancer, affecter les systèmes immunitaire, reproducteur, nerveux et endocrinien, voire provoquer d'autres maladies). C'est pourquoi une gestion efficace des huiles usagées est extrêmement importante pour garantir un environnement durable et sain.
Lors de cette session thématique, les quatre présentations ont mis en évidence le fait que les dispositions techniques mises en œuvre en matière de gestion des huiles usagées doivent être adaptées au contexte local, notamment au regard des gisements disponibles et des infrastructures existantes.
Dans un vaste territoire comme la Nouvelle-Calédonie, disposant d’une production d'huiles usagées en quantité suffisante et des infrastructures appropriées, une valorisation locale est possible, à condition que la qualité de l'huile le permette. Dans ce contexte, la priorité est d'inciter les producteurs à assurer une collecte et un stockage appropriés afin de sécuriser la qualité des huiles usagées.
Mais pour une petite île isolée, faiblement peuplée, la production d'huiles usagées est insuffisante pour mettre en place des installations de traitement/valorisation rentables. Ateliana MAUGATEAU, adjointe au chef du Service Territorial de l'Environnement de Wallis-et-Futuna, a ainsi déclaré que "la solution idéale serait d'évacuer régulièrement les huiles usagées collectées, mais le gisement produit annuellement n'est pas rentable à l'exportation, nous devons donc stocker de grandes quantités sur plusieurs années avant de pouvoir les évacuer."
Dans ce contexte, la priorité est de mettre en place des centres de stockage temporaire mais de longue durée répondant aux normes environnementales et sanitaires, incluant des équipements de suivi de l'impact sur l'environnement (qualité des eaux de surface et des eaux souterraines, qualité de l'air).
Ces centres doivent être conçus pour anticiper tout déversement qui pourrait conduire à une contamination de l’environnement, et ainsi induire des coûts de dépollution significatifs. La priorité est également de s'assurer que l’exploitation (collecte, stockage, transfert...) soit menée dans de bonnes conditions pour éviter la dégradation de la qualité des huiles usagées. Car comme rappelé par M. Thomas KLEIN, Directeur Exécutif de l’entreprise SOCADIS SARL "plus la qualité de l'huile usagée est mauvaise, plus le coût du traitement est élevé."
Mme MAUGATEAU a également suggéré la mise en place d'un système régional de valorisation afin de développer une économie circulaire par le biais d'une coopération régionale en matière de gestion et de transfert maritime des déchets dangereux dans le respect des réglementations internationales.
Au final, les expériences de Wallis et Futuna et de la Nouvelle-Calédonie ont montré quequel que soit le contexte et les modalités adoptées, les coûts de gestion des huiles usagées restent importants ; ils doivent couvrir les dépenses de collecte, de stockage, de transfert et d'élimination. Pour ce faire, la mise en place de mécanismes nationaux de financement durable est nécessaire pour couvrir ces coûts, soit par le biais de taxes à l'importation, soit par la mise en place d'autres systèmes tels que le principe de Responsabilité Elargie du Producteur (REP) existant en Nouvelle-Calédonie.
Ce mécanisme de financement est encadré par un texte fixant les obligations des producteurs et les sanctions applicables en cas de non-respect. Ce dispositif est également encadré par un cahier des charges décrivant les objectifs de collecte et de valorisation, ainsi que les modalités de collecte, de traitement, de traçabilité et de financement.
En conséquence, chaque producteur et opérateur de traitement doit établir et soumettre son propre plan de gestion à l'approbation de la Province, qui délivre un accord d’une durée de 5 ans. Un rapport d'activité doit être déposé annuellement et approuvé par une Commission. La réglementation prévoit également des sanctions administratives et/ou pénales en cas d'infraction (fausse déclaration quantitative, abandon de déchets, déversement illégal, etc.)
Mme Sandra SONTHEIMER, Ingénieur Prévention et Gestion des Déchets à la Direction de l'Environnement de la Province Sud de Nouvelle-Calédonie, a indiqué que le mécanisme de type REP permet de mettre en œuvre des actions de prévention en matière de production de déchets, de financer la filière et d'améliorer la transparence des coûts de gestion, ainsi que de soutenir l'accélération de l'industrialisation et la modernisation des processus de gestion des déchets.
En pratique, les producteurs et importateurs d'huiles et de produits dérivés de Nouvelle-Calédonie sont regroupés au sein de l'éco-organisme à but non lucratif TRECODEC, qui met en œuvre les obligations rattachées au dispositif REP.
Pour ce faire, le prix de mise sur le marché des produits comprend une éco-participation de 26CPF/litre pour couvrir les frais de gestion : le consommateur paye cette éco-participation au distributeur ; celle-ci est ensuite reversée à TRECODEC pour financer les équipements et dispositifs de collecte et de traitement.
Enfin, comme mentionné par M. Bernard CREUGNET, Directeur de l'éco-organisme TRECODEC, l'un des avantages de ce dispositif est de soutenir la mise en place de procédés de traitement axés sur des nouveaux flux de déchets. A ce titre, TRECODEC travaille actuellement au développement de nouvelles filières de traitement des déchets connexes tels que les chiffons, les bidons, les filtres, les flexibles, les aérosols ayant contenu des dérivés d'hydrocarbures, etc.
Le PROE, par le biais du projet SWAP (Committing to Sustainable Waste Actions in the Pacific), financé par l'Agence française de développement (AFD) pour une durée de 4 ans, aide ses pays et territoires membres (Fidji, Polynésie française, Samoa, Îles Salomon, Vanuatu, Tonga et Wallis-et-Futuna) à développer des mécanismes institutionnels tels que des plans nationaux de gestion des huiles usagées comprenant des mécanismes de financement durable. Le projet SWAP fournit également un soutien technique et financier pour la conception et la mise en œuvre de systèmes de collecte, de traitement et de valorisation.
La session thématique portant sur la gestion des huiles usagées a réuni Mme Ateliana MAUGATEAU, adjointe au chef du Service Territorial de l'Environnement de Wallis et Futuna, Mme Sandra SONTHEIMER, Ingénieur Prévention et Gestion des Déchets du Service de l’Environnement de la Province Sud de Nouvelle-Calédonie, M. Bernard CREUGNET, Directeur de l'éco-organisme TRECODEC et M. Thomas KLEIN, Directeur Exécutif de l’entreprise SOCADIS SARL.
Au sujet de la 3ème Table Ronde pour un Pacific propre 2021
La troisième table ronde du Pacifique propre s’est tenue virtuellement du 16 au 25 novembre. Cet événement a été organisé en partenariat avec la Nouvelle-Calédonie, Acotred Pacific, l'Agence française de développement (AFD), Australian Aid (AUS Aid), l'Union européenne (UE), le Fonds Pacifique, l'Agence japonaise de coopération internationale (JICA), le Programme des Nations Unies pour l'environnement, la Province SUD et la Province NORD.
Au sujet du projet SWAP
Le projet SWAP vise à améliorer, au moyen d’une gestion appropriée des déchets, les conditions sanitaires, environnementales, sociales et économiques dans les pays et territoires insulaires du Pacifique. Les sept pays et territoires insulaires du Pacifique impliqués dans le projet SWAP sont les Fidji, les Îles Salomon, la Polynésie française, le Samoa, les Tonga, le Vanuatu et Wallis-et-Futuna. La Nouvelle-Calédonie recevra également un appui technique du SWAP.
Le projet « S’engager pour une gestion durable des déchets dans le Pacifique » (Committing to Sustainable Waste Actions in the Pacific – SWAP) est financé par l’Agence française de développement (AFD) https://www.afd.fr/ et mis en œuvre par le Secrétariat du Programme régional océanien de l’environnement (PROE) https://www.sprep.org/ .
L’Agence française de développement (AFD) met en œuvre la politique de la France en matière de développement et de solidarité internationale. Par ses financements aux ONG et au secteur public, ainsi que ses travaux de recherche et ses publications, l’AFD accompagne et accélère les transitions vers un monde plus juste et résilient. Elle propose également des formations dans le domaine du développement durable (Campus AFD) et des activités de sensibilisation en France.
« Nous construisons avec nos partenaires des solutions partagées, avec et pour les populations du Sud. Nos équipes sont engagées dans plus de 4 000 projets sur le terrain, dans les Outre-mer français et dans 115 pays et territoires en crise, pour les biens communs : le climat, la biodiversité, la paix, l’égalité femmes-hommes, l’éducation ou encore la santé. Nous contribuons ainsi à l’engagement de la France et des Français en faveur des Objectifs de développement durable (ODD). Pour un monde en commun. »
Pour de plus amples informations, veuillez contacter Mme Julie Pillet, coordinatrice du SWAP à l’adresse : [email protected]. Ou vous rendre sur le site Internet dédié : https://www.sprep.org/SWAP/fr/sustainable-waste-actions-in-the-pacific-swap